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vendredi 23 décembre 2011

Vaclav Havel


Vaclav Havel

En 1993, lors de mon second périple en Europe centrale, il m'était impossible de ne pas revoir Prague. La ville était alors devenue la capitale de la Tchéquie nouvelle, et en déambulant dans le coeur de la cité, je retrouvais sans peine les images sensationnelles qui m'avaient subjugué l'année précédente. Prague. Un nom, une âme. La ville me paraissait si loin de Lille que je ne parvenais pas à établir de lien avec l'Europe dite occidentale.
En train, ce n'est pourtant pas si loin, mais dans un livre d'histoire, Prague c'est ailleurs, c'est dans un autre temps.
En septembre 1993, alors que les sites principaux me sont devenus familier, je me hasarde sans carte ni repère dans les entrailles de la cité. Tout est si beau que je me sens libre de me perdre. J'ose franchir la porte d'une taverne sombre, attiré par une petite enseigne Rock, en parfait contraste avec les boiseries et vitraux du XVIIe siècle. Le lieu est figé dans le temps, somptueux, confiné, mais la faune est jeune, bigarrée et animée; Il respire la contre-culture, la jeunesse, le bruit. Je suis bien tombé, me dis-je.

Prague « Underground »

En feuilletant le dépliant du lieu, je découvre que Moe Tucker y donne un concert ce soir. Moe Tucker a été membre de The Velvet Underground, le groupe New Yorkais qui a donné son sens au terme "musique Underground", durant les années 1965-1970. Un groupe que j’adore; Le Velvet, c’est ma religion.
Je me dis que j'ai une chance incroyable et qu'il fait décidément bon de se perdre dans Prague.
Il est acquis que je me suis adresseé à la barmaid pour lui acheter un billet, que j’ai, pour l’occasion retrouvé mon plan de la ville pour tenter, sans succès, d'y dessiner un gros point rouge pour désigner l'endroit. Il est 17 heures, et je suis fébrile. Je sors visiter un peu le quartier- pas trop loin, je ne veux à aucun prix manquer le show - et suis de retour à 20 heures pour la réouverture du lieu.

Les pépites

Le spectacle commence. Je me suis faufilé au premier rang, juste derrière le cordon de sécurité, je suis aux anges. J'ai l'impression d'assister, avec 150 autres chanceux, à un truc rare, un « Showcase » confidentiel qu'on ne voit qu'une fois.
Mais quelle n'est pas ma surprise lorsque, me familiarisant avec l'obscurité et le garde du corps posté juste à côté de moi, je réalise que l'homme assis à une table juste en avant est ...
Mais oui, c'est lui, c'est Vaclav Havel, en train de fumer une cigarette, comme n'importe quel client. En tout cas, pas comme le président qu'il a été et qu'il est redevenu. Les jambes croisées, la veste de tweed, le profil familier, il savoure le spectacle en homme simple mais néanmoins initié. Je le devine de connivence avec les musiciens comme il sait l’être avec son peuple. Tout simplement Vaclav Havel, là à deux mètres de moi, parmi les ombres envoutantes des noctambules, les mélodies improbables des générations.

Là, je suis renversé! Je ne sais plus si c'est sa présence ou la chance d’être ici ce soir qui m'impressionne le plus, mais j'ai un sourire en banane et des pépites dans les yeux.
Le garde du corps que je finis par questionner histoire d'être certain de ne pas rêver, me comprend à travers le bruit et me fait oui de la tête en souriant. (Rit-il du seul gars dans la foule qui n'y croit pas?)

Le billet

Je cherche mécaniquement mon billet de concert, tout en essayant de conserver ma place car la foule commence à remuer solide autour de moi. À défaut d'avoir une photo à prendre, je me dis que sa signature scellera le moment que je vis. Mais j'hésite. Un autographe c'est un peu idiot, me dis-je. Si au moins j'avais un de ses livres...

Le garde du corps que le bruit sur scène et la danse de la foule ne rendent pas nerveux comprend mon hésitation et m'invite à lui donner mon billet. Je m'exécute tout en le regardant, incrédule, porter le tout à l'illustre personne que je ne cesse de regarder entre les volutes découpées par les néons. Vaclav Havel lève les yeux vers son interlocuteur, puis tourne la tête dans ma direction, m'identifie d'un seul coup d'oeil et me regarde. Il prend mon billet, se redresse pour y écrire quelques mots à l'endos, puis redonne le tout à son messager. Il m'adresse alors un sourire amical, accompagnant d'un chaleureux salut de la main son témoignage de gratitude. Je lui dis merci, sans voix, par delà la musique.

Son geste a duré pour moi l'instant d'une éternité.

L'impression que j'en garde est aussi forte que les mots de Vaclav Havel sur mon billet: "Občanské fórum" (Forum Civique), accompagnés du symbole du cœur en guise de dédicace.
Ce n'est pas un autographe.
C'est une promesse.
J’y ai lu la conviction que l'on doit toujours suivre sa voie, en tant que peuple ou individu, peu importent les chemins à emprunter pour y parvenir.

mardi 20 décembre 2011

Cosmopolis

Parmi tous les gens que je connais, certains demeurent à Lille et à Montréal, et d'autres sont partis vivre à Paris ou à Marseille, à Rome ou à Toronto, à New Delhi, à Bordeaux, à Hong-Kong, Croix, Le Caire, Jérusalem.

Pourtant ils habitent tous mes pensées, là, dans ma tête, juste au dessus des yeux.
Je n'ai donc pas besoin de les voir pour penser à eux.
N'empêche que j'ai toujours le goût de voyager...

lundi 19 décembre 2011

Guerre à la pollution.

Les effets des guerres sont-ils pris en compte dans les accords internationaux sur les niveaux de pollution tels que Kyoto ?
La pollution atmosphérique causée par les conflits armés n'égale que le volume des combats en cours actuellement. Savons-nous ce que dégage en CO2 un seul F-17, un seul missile sol-air, un char d'assault? Le niveau de pollution est-il pris en compte par les fabricants de fusées, malgré leur souci affiché de consommer moins de carburant?
Le niveau de pollution causé par la guerre, s'il était négocié dans les accords internationaux, rendrait  tout accord beaucoup plus difficile. Notamment parce que la pollution est, dans le cas de conflits entre nations, causée par des belligerants hors de leurs frontières. Notamment parce de nombreuses nations assises à la table des négociations ne sont pas impliquées.
Mais introduire ce champ d'activité qu'est la guerre dans les négociations sur les niveaux de pollution à limiter ou contrôler pourrait nous amener, à terme, à envisager de négocier la décontamination lors des accords de paix.

mardi 13 décembre 2011

L'oeuvre-produit

Une création musicale est une œuvre d’art, une expression émotionnelle qui jaillit sous l’impulsion de l’inspiration et prend forme par le travail. Le partage de la création, sa diffusion, son expansion dans les consciences se fait par la commercialisation: vente et diffusion de la musique, pour écoute individuelle ou collective. La création s’appelle alors un produit, un hit, un beat, un bit. Par ce transport, elle redevient ensuite, entre nos oreilles une création, en provoquant en nous des émotions.

Il est inutile et vain d’opposer l’œuvre et le produit, la création et son commerce, les notes de musique et les chiffres. Une chanson, une musique est autant un œuvre qu’un produit. Il n’est donc pas déraisonnable de réfléchir à la création en termes de production, d’offre et de demande.

Cette évidence semble se dissiper dans l'opinion publique si l’on évoque un décalage entre l’offre et la demande musicale.Évoquer l’insuffisance de l’offre musicale, par exemple, est admis et encouragé par l'opinion publique (pour défendre des quotas de production francophone, notamment.)

Mais, évoquer la surproduction d’offre musicale n’est généralement pas accepté par cette même opinion publique. Pourquoi? Simplement  parce que qu'il est difficile d'admettre que l’œuvre soit aussi un produit, et parce que toute analyse des produits est souvent interprétée comme une analyse de la création; Le premier met en jeu notre raisonnement analytique, tandis que la seconde naît et croît au travers nos émotions. Innée puis culturelle, cette dichotomie ( ce réflexe) n'est pas facile à contourner.

En poussant plus loin notre exemple, admettre qu'il puisse exister une surabondance de produits musicaux mis en marché ne signifie pas admettre qu'il y a surabondance de création musicale.
Il peut exister autant de créations musicales que d'individus, et même davantage que d'individus - et c'est souhaitable - mais il se peut également - c'est alors inévitable - qu'il existât autant sinon plus de produits musicaux que d'êtres humains.

La contradiction création - produit n'est qu'apparente et ne profite ni à l'artiste, ni au vendeur. C'est d'ailleurs souvent la même personne.

mercredi 7 décembre 2011

Cynisme ou désabusement?

Bonjour,

En complément de ma réflexion formulée dans mon billet du 7 novembre 2011, je vous invite à lire cet article paru dans Le Devoir de ce matin. L'auteur évoque dès le second paragraphe "le cynisme ambiant [...] de la population". 
L'article décortique ensuite les réponses des abstentionnistes qui s'expriment sur leur vision de la politique, de la démocratie.
Un peu de cynisme de façade, mais beaucoup de désillusion, d'espoir également.

jeudi 1 décembre 2011

Tous aux abris!

Tous aux abris!

Dans mon quartier les citoyens rivalisent d'ardeur pour monter leur abri tempo au plus vite (pour les non Québécois, un abri tempo est un abri temporaire, une sorte de garage souple pour protéger une voiture de la neige durant l'hiver.)
La compétition a commencé le 5 octobre lorsqu'un voisin audacieux a déballé ses barres de métal, sa toile et a monté son gros mécano en trois heures. Tout blanc, tout neuf, l'abri tempo a trôné fièrement seul dans la rue une semaine durant. C'est le temps qu'il a fallu aux voisins pour rire de lui, puis se dire que finalement ils seraient bien avisés de l'imiter. Il n'a fallu que trois jours pour qu'une autre série de voisins rient en choeur avant de se décider eux aussi à redéfinir l'architecture du quartier. Depuis, l'effet boule de neige s'est produit, et je suis l'un des rare à encore rire de mes voisins. En fait je ne ris plus, et ma voiture se sent nue la nuit.
Je veux moi aussi installer un abri tempo. Non par conformisme - ce qui arrivera en fin de compte - mais par intérêt, car déneiger une auto, cela prend une heure.
La neige est translucide, et moi je suis lucide.
Je crois maintenant que mes voisins rient de moi, en se demandant si j'aurai monté mon abri tempo avant la première tempête.
Le compte à rebours est lancé...